Premiers indices de l'existence de neutrinos électroniques au Japon
Des chercheurs de la High Energy Accelerator Research Organization (KEK) ont observé au Japon pour la première fois et avec une grande probabilité la transformation de neutrinos muoniques en neutrinos électroniques. Cette constatation résulte de l'exploitation de résultats de mesure issus de l'expérience «Tokai to Kamioka» (T2K). Grâce à la meilleure connaissance des caractéristiques des neutrinos, les chercheurs espèrent trouver des explications concernant la dominance de la matière par rapport à l'antimatière.
Depuis le lancement de l'expérience T2K en janvier 2010 jusqu'à son arrêt du fait du séisme de mars 2011, les scientifiques ont pu observer grâce au détecteur Super Kamiokande 88 neutrinos au total, dont six ont été clairement identifiés comme des neutrinos électroniques. La probabilité que les neutrinos électroniques observés soient issus de la transformation de neutrinos muoniques est de 93,3%. Mais les scientifiques n'ont pas encore atteint leur objectif avec cette simple constatation: car jusqu'à présent seuls 2% des observations de neutrinos escomptées ont été comptées. C'est pourquoi il a été décidé de reprendre à la fin 2011 la production de neutrinos sur l'accélérateur de particules du Japan Proton Accelerator Research Complex (J-Parc). Les chercheurs espèrent à l'avenir étendre leurs connaissances des neutrinos par l'intensification du faisceau de particules et la mise en œuvre de détecteurs plus sensibles. L'origine de la masse des particules élémentaires constitue en effet l'une des questions fondamentales de la physique des particules. La détermination de la masse d'un neutrino y joue donc un rôle majeur.
L'expérience T2K consiste à émettre à partir du J-Parc sur la côte orientale du Japon un faisceau de neutrinos muoniques en direction du détecteur souterrain Super Kamiokande situé à 295 km de distance. Le détecteur est constitué d'un réservoir rempli de 50'000 t d'eau, dont la paroi intérieure est tapissée de près de 11'200 capteurs photoélectriques ultrasensibles (photomultiplicateurs). Les neutrinos traversent la masse d'eau du détecteur en créant un rayonnement dit de Tcherenkov qui renseigne sur la saveur du neutrino. Avec cette expérience, les scientifiques désirent analyser ladite oscillation du neutrino, à savoir la transformation d'une saveur de neutrino en une autre. L'une des tâches essentielles de l'expérience est donc la mise en évidence de neutrinos électroniques.
Sur les talons de l'oscillation de neutrinos dans le monde entier
Outre l'expérience T2K, il existe également d'autres instituts de recherche qui sont sur la piste des arrière-plans de l'oscillation de neutrinos en utilisant des accélérateurs de particules. En mai, il y a un an, le premier neutrino tauique a probablement été mis en évidence par le détecteur Opera localisé à Gran Sasso en Italie. L'Organisation européenne pour la recherche nucléaire CERN à Genève participe à l'expérience. Une expérience analogue (Minos) est menée aux Etats-Unis. Ici, un accélérateur de particules du Fermi Lab à proximité de Chicago émet un faisceau de neutrinos vers un détecteur situé à près de 750 km, dans les mines de Soudan au nord du Minnesota. Le Fermi Lab prévoit également la construction d'une autre installation de recherche dénommée Nova.
Des centrales nucléaires comme sources de neutrinos
Les expériences Double Chooz en France et Daya Bay en Chine font appel à un autre concept de l'étude de l'oscillation de neutrinos. Comme leur nom l'indique, ce sont les centrales nucléaires locales qui sont utilisées comme sources de neutrinos. La désintégration des produits de fission du combustible nucléaire génère accessoirement des antineutrinos électroniques. Comme pour les expériences alimentées par des accélérateurs de particules, les neutrinos sont analysés et comparés avec un détecteur proche de la source et un détecteur éloigné de la source. La distance entre le cœur du réacteur et le détecteur distant est de près d'un kilomètre pour Double Chooz et de près de trois kilomètres pour Daya Bay. Jusqu'au détecteur proche, les antineutrinos n'ont pas encore le temps de se transformer en une autre saveur. Le second détecteur est donc disposé à une distance plus grande, à laquelle les transformations sont plus probables. Les détecteurs ne peuvent mesurer que les antineutrinos produits dans les cœurs de réacteur. Si le détecteur distant mesure moins de neutrinos qu'attendu du fait de la «déperdition de distance», on peut partir du principe que les antineutrinos électroniques se sont partiellement transformés en une autre saveur.
Source
M.B./P.C. d'après un communiqué de presse de la KEK du 15 juin 2011
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