Les experts demandent à l’UE de réévaluer les critères de sécurité
Satu Helynen, président de la Sustainable Nuclear Energy Technology Platform (SNETP), s’est adressé – au nom de plus de 100 organisations actives dans le domaine de l’énergie nucléaire, de scientifiques et de défenseurs de l’environnement – à la Commission européenne et à des décideurs politiques de l’UE pour leur demander de réaliser une évaluation «juste et rapide» des critères en vigueur concernant l’absence de préjudice significatif («do no significant harm criteria») dans le domaine de l'énergie nucléaire.
Dans le courrier adressé aux Vice-présidents exécutifs de la Commission, Valdis Dombrovskis et Frans Timmermans, ainsi qu’à la Commissaire européenne à l'énergie, Kadri Simson, il est indiqué que l’évaluation des critères relatifs à l’absence de préjudice significatif doit se baser sur des connaissances scientifiques et ne pas être influencée par un agenda politique ou idéologique. «La lutte contre le changement climatique revêt une urgence absolue. L’ensemble des sources d'énergie pauvres en carbone doivent pouvoir apporter une contribution, et la taxonomie finale pour des finances durables doit tenir compte de ces points.»
Système de classification à l'échelle de l’UE pour des investissements durables (taxonomie)
Dans un rapport sur les finances durables du 9 mars 2020, le groupe d’experts techniques pour la taxonomie de l’UE est arrivé à la conclusion que des indications irréfutables montraient que les centrales nucléaires contribuaient sensiblement à la protection du climat. Le groupe a toutefois aussi précisé qu’actuellement, l’évaluation des connaissances sur l’énergie nucléaire était complexe et d'autant plus dans le contexte taxonomique, en ce qui concerne les préjudices considérables possibles pour d’autres objectifs environnementaux. Le rapport recommande de mener des travaux techniques plus poussés.
Les recommandations formulées par le groupe d’experts dans le rapport sur les finances durables portent aussi sur une réglementation de la taxonomie, un système de classification sur le financement des activités économiques durables. La taxonomie proposée doit établir une langue commune qui pourra être utilisée comme base pour les investisseurs et les entreprises souhaitant investir dans des projets et des activités économiques visant des effets positifs sur le climat et l’environnement. Elle prévoit que dans le cadre de l’évaluation de la durabilité d’une activité économique, une série d’objectifs environnementaux soient pris en compte. Le concept d’absence de préjudice significatif doit garantir que les technologies énergétiques ne nuiront pas à d'autres objectifs, par exemple l’économie, la gestion des déchets, la biodiversité, la gestion des eaux, et la pollution environnementale.
L’énergie nucléaire est nécessaire
Les débats sur l'énergie nucléaire étant avant tout d’ordre politique et émotionnel, les auteurs du rapport estiment que l’évaluation du critère d’absence de préjudice pour la technologie nucléaire reste techniquement exigeante et fondée sur des faits, et doit être réalisée par des experts qualifiés.
D'après le courrier, des groupes anti-nucléaires demandent déjà que l'énergie nucléaire soit rayée de la liste des activités durables dans le cadre de la taxonomie. Toutefois, la plupart des arguments invoqués ne se fondent pas sur des connaissances scientifiques.
Par ailleurs, les énergies renouvelables, bien qu’elles se développent rapidement, ne sont pas en mesure de mettre à disposition les capacités de production requises pour permettre à l’Europe d’atteindre la neutralité climatique à l’horizon 2050. D'après le rapport, «un système d’approvisionnement électrique qui se fonde exclusivement sur les énergies renouvelables, des solutions liées à la demande et de la flexibilité occasionnerait des problèmes considérables avec la stabilité du système». «En outre, une restructuration globale et la construction de réseaux électriques dans l’ensemble de l’UE sont nécessaires.»
Parmi les signataires du courrier figuraient les organisations non-gouvernementales European Nuclear Society (ENS), Nuclear Matters, Bright New World, ClearPath et Energy for Humanity.
Source
M.A./C.B. d’après le courrier «Assuring the Backbone of a Carbon-free Power System by 2050 – Call for a Timely and Just Assessment of Nuclear Energy» du 24 avril 2020