L’EFDA devient Eurofusion
L’ère de l’EFDA (European Fusion Development Agreement) a pris fin le 31 décembre 2013. Le nouveau consortium de l’UE pour la recherche sur la fusion s’appelle désormais Eurofusion. Francesco Romanelli, jusque-là directeur de l’EFDA, expose dans un entretien avec l’agence de presse internationale du nucléaire NucNet les raisons de cette réorganisation et ses conséquences pour la recherche européenne sur la fusion.
NucNet: Qu’est-ce qui a motivé la réorganisation du paysage de la fusion en Europe?
Francesco Romanelli: La raison principale est l’adaptation aux défis qui se posent en lien avec le réacteur expérimental thermonucléaire international (Iter). Ce changement est comparable à celui effectué au début des années 1970 au sein du programme Euratom. Il avait alors été découvert que le tokamak T3, en Russie, produisait une température de 1 keV (environ 11 millions de degrés Kelvin), ce qui constituait une percée majeure. Suite à cela, la communauté de la fusion, la Commission européenne et les dirigeants des centres de recherche avaient décidé d’orienter le programme européen de fusion vers la technologie Tokamak et de faire avancer le développement d’une grande installation commune en Europe. C’est ainsi que commença la planification de l’expérience commune européenne JET (Joint European Torus) à Oxford, en Grande-Bretagne. Nous nous trouvons actuellement face à une situation comparable. Nous devons nous préparer au fait que d’ici dix ans, Iter sera en service, et par conséquent nous atteler au plus vite à la préparation d’une installation de démonstration.
Le nouveau consortium est-il plus focalisé sur la fourniture de courant?
Nous sommes toujours dans la phase de recherche. Mais oui, nous devons nous préparer au fait que nous allons produire du courant avec la fusion. C’est pourquoi nous mettons en œuvre notre programme en appliquant les recommandations et les priorités de la nouvelle «European Fusion Roadmap», publiées en novembre 2012. Iter est l’élément clé de cette feuille de route. Elle a été élaborée en prenant en considération les recommandations d’une commission de la direction générale européenne pour la recherche. Cette commission était présidée par Albrecht Wagner, qui a travaillé au synchrotron allemand à électrons (Desy) et au Centre européen pour la recherche nucléaire Cern à Genève. La commission a travaillé sur l’orientation stratégique de la recherche sur la fusion, y compris le rôle du JET dans le soutien apporté à Iter. La commission a principalement recommandé de restructurer entièrement le programme européen de recherche sur la fusion pour être mieux équipé face aux défis qui accompagneront la mise en service d’Iter.
Qu’est-ce que cela signifie concrètement? Qu’est-ce qui va changer?
Ce qui va changer, c’est que, dans le scénario de base, les centres de recherche ne vont plus recevoir de soutien. L’implication directe de l’industrie dans le programme de fusion devient dès lors nécessaire pour le développement, la conception, la construction et l’exploitation d’une installation de fusion de démonstration. Dans les décennies à venir, le programme passera de l’orientation actuelle, axée sur la science et la recherche, à celle d’un projet basé sur l’industrie et la technologie. Nous divisons le programme en un certain nombre d’unités de travail qui comportent soit la production d’un élément principal, soit des projets spécifiques, tous axés sur les tâches de la feuille de route. Ce système donne aux membres de l’EFDA la possibilité de prendre part à des activités et de tirer profit des connaissances spécialisées de chacun des centres de recherche. Le nouveau consortium souhaite soutenir les efforts qui visent à améliorer la compréhension fondamentale des plasmas. Nous prévoyons par ailleurs d’injecter des ressources substantielles dans la préparation d’une nouvelle génération de chercheurs, la génération Iter, à tous les niveaux de l’enseignement supérieur. La nouvelle feuille de route sera mise en œuvre le 1er janvier 2014. En résumé, on peut dire que nous réorientons clairement la production de courant au moyen de la fusion sur la voie de son application.
Source
D.S./T.M. d’après NucNet du 9 décembre 2013