Fessenheim: l’accident qui n’en était pas un
Le 4 mars 2016, la chaîne télévisée allemande Westdeutsche Rundfunk (WDR), à Cologne, annonçait concernant la centrale nucléaire française de Fessenheim, en Alsace: «Atom-Unfall offenbar vertuscht.» («Dissimulation d’un accident nucléaire»). L’autorité de sûreté nucléaire française (ASN) a pris position sur le sujet: il ne s’agit pas d’un accident nucléaire, et rien n’a été dissimulé. Le 9 avril, l’équipe d’exploitation a fait tout ce qu’il fallait pour un incident d’exploitation classé au niveau 1 de l’échelle Ines, et a arrêté le réacteur 1 conformément aux prescriptions d’exploitation normales. A aucun moment l’incident n’a représenté de danger pour le personnel ou l’environnement.
L’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a notamment précisé concernant les accusations portées:
- L’exploitante Electricité de France (EDF) a immédiatement informé l’ASN, et celle-ci a procédé à une inspection sur place dès le lendemain.
- L’ASN a publié sur son site Internet les informations à sa disposition les 17 et 24 avril 2014.
- En juin et septembre 2014, la commission locale d’information et de surveillance de la centrale de Fessenheim a été informée de l’incident. En mai et septembre 2014, les rapports ont été présentés à la commission franco-allemande sur la sûreté des réacteurs (DFK). En septembre 2014, c’était au tour de la commission franco-suisse de sûreté nucléaire et de radioprotection (CFS) d’être informée.
Que s’est-il passé?
Dans l’après-midi du 9 avril 2014, un réservoir d’eau d’un circuit de réfrigération a débordé dans la salle des machines du réacteur 1. Le trop-plein prévu dans ce cas était cependant obstrué au niveau du sol et l’eau s’est écoulée dans le bâtiment d’exploitation, puis dans les armoires électriques de la voie A du système automatique de protection du réacteur, ce qui a mis hors service cette voie. L’indicateur visuel de position des grappes de commande n’était plus disponible lui non plus. Les opérateurs ont ensuite lentement arrêté le réacteur en utilisant l’ajout de bore. Etant donné que, parallèlement, la demande de puissance a augmenté sur le réseau électrique, la température du fluide de refroidissement dans le circuit primaire est passée en dessous de la limite prévue pour cette phase d’exploitation durant 14 minutes, soit de 286°C à 282°C. Si la différence de température avait été plus importante, cela aurait provoqué un arrêt automatique du réacteur via la voie B. Et si la voie B n’avait pas été disponible elle non plus, les opérateurs auraient encore pu déclencher manuellement un arrêt d’urgence.
Aucun arrêt d’urgence nécessaire
Concernant la signification sur le plan de la sécurité de cet incident, l’ASN a précisé:
- Le système de protection du réacteur possède un double équipement. La voie B est restée disponible à tout moment en vue d’un éventuel arrêt d’urgence.
- Aucun arrêt d’urgence n’a été nécessaire afin de maîtriser l’incident.
- Bien que l’utilisation du bore pour arrêter un réacteur soit une procédure peu courante, elle est conforme aux procédures de conduite normale.
- L’évènement n’a pas eu de conséquences sur le personnel et l’environnement de l’installation. Cependant, étant donné que le niveau de protection du réacteur a été réduit en raison du dysfonctionnement de la voie A, l’évènement a été classé au niveau 1 de l’échelle internationale des évènements nucléaires Ines.
L’ordonnance suisse sur l’énergie nucléaire définit le niveau 1 de l’échelle Ines de la manière suivante: «Anomalie amenant l'installation en dehors des conditions de fonctionnement prescrites. Elle peut être due à une défaillance du matériel, à une erreur humaine ou à une insuffisance dans les procédures. Evénèment ou constat sans importance directe pour la sécurité, mais avec des carences non négligeables dans l'organisation ou sur le plan de la culture de la sécurité.»
Des contrôles dans toutes les centrales françaises
Suite à l’incident, EDF a analysé l’origine de l’infiltration d’eau dans les étages inférieurs du bâtiment d’exploitation, et a pris les mesures correspondantes. Au cours de l’année 2014, l’exploitante a contrôlé le problème d’inondation interne rencontré à Fessenheim dans l’ensemble de ses centrales. Des plans d’action ont été mis en place lorsque cela était nécessaire, consistant notamment à nettoyer certaines parties des installations et à effectuer des contrôles supplémentaires.
L’ASN est arrivée à la conclusion générale que «dans le cas de l’évènement du 9 avril 2014, le réacteur est toujours resté dans le domaine d’application des règles de conduite normale. A aucun moment il n’a été nécessaire d’appliquer les procédures accidentelles, aucun système de sauvegarde du réacteur n’a été sollicité alors qu’ils étaient tous opérationnels.»
Source
M.S./C.B. d’après des communiqués de presse de l’ASN du 10 mars 2016