Cours de justice de l’UE: la taxe allemande sur le combustible nucléaire est compatible avec le droit de l’Union
La cour de justice de l’Union européenne (CJUE), la plus haute juridiction de l’Union, estime que la taxe allemande sur le combustible nucléaire est compatible avec le droit de l’Union. Les juges de la CJUE ont ainsi suivi les conclusions de l’avocat général de février 2015.
La taxe allemande sur le combustible nucléaire est entrée en vigueur le 1er janvier 2011. Le gouvernement allemand a introduit avec elle un nouvel impôt sur l’utilisation de combustible nucléaire pour la production industrielle d’électricité. Cette taxe s’élève à 145 euros (CHF 152) pour un gramme de plutonium 239, de plutonium 241, d’uranium 233 ou d’uranium 235 et est due par les exploitants des centrales nucléaires. Elle vise à financer notamment la réhabilitation nécessaire du site minier d’Asse II, dans lequel sont stockés des déchets radioactifs provenant de l’utilisation de combustible nucléaire.
Kernkraftwerke Lippe-Ems GmbH, une coentreprise composée de RWE Power AG et d’E.On Kernkraft GmbH qui exploite la centrale nucléaire d’Emsland à Lingen conteste cette taxe devant le tribunal des finances de Hambourg. Lippe-Ems est d’avis que la taxe allemande sur le combustible nucléaire n’est pas compatible avec le droit de l’Union. Le tribunal de Hambourg a décidé d’interroger la CJUE sur la compatibilité de cette taxe avec le droit de l’Union.
La CJUE a ainsi décidé de suivre les conclusions de l’avocat général compétent en date de février 2015, et a conclu que la taxe allemande sur le combustible nucléaire est compatible avec le droit de l’Union.
Pas d’exonération de la taxe sur le combustible nucléaire
Par son arrêt du 4 juin 2015, la CJUE rejette tout d’abord l’argument de Lippe-Ems selon lequel le combustible nucléaire doit être exonéré de la taxe conformément à la directive sur la taxation des produits énergétiques et de l’électricité. En effet, dans la mesure où, en tout état de cause, ce combustible ne figure pas dans la liste exhaustive des produits énergétiques dressée par la directive, le combustible nucléaire ne peut pas relever de l’exonération prévue pour certains de ces produits. Selon la Cour, l’exonération en cause ne peut pas non plus être appliquée par analogie. À cet égard, la Cour rejette, en substance, l’idée qu’il ne peut pas y avoir perception simultanée d’une taxe sur la consommation d’énergie électrique et d’une taxe grevant les sources de production de cette énergie qui ne sont pas des produits énergétiques au sens de la directive.
La taxe sur le combustible nucléaire ni une taxe d’accise…
Ensuite, la Cour constate que la directive relative au régime général d’accise ne s’oppose pas non plus à la taxe allemande sur le combustible nucléaire, laquelle est perçue sur l’utilisation de ce combustible aux fins de la production industrielle d’électricité. En effet, dès lors qu’elle ne frappe pas (directement ou indirectement) la consommation d’électricité ni celle d’un autre produit soumis à accise, cette taxe ne constitue ni un droit d’accise sur l’électricité ni une «taxe indirecte supplémentaire» sur ce produit au sens de la directive.
… ni une aide d’Etat…
En outre, d’après la CJUE, la taxe allemande sur le combustible nucléaire ne constitue pas une aide d’État proscrite par le droit de l’Union. En effet, il ne s’agit pas d’une mesure sélective. Les productions d’électricité autres que celles utilisant du combustible nucléaire ne sont pas concernées par le régime instauré par la loi relative à la taxe sur le combustible nucléaire. En tout état de cause, elles ne se trouvent pas, au regard de l’objectif visé par ce régime, dans une situation factuelle et juridique comparable à celle des productions d’électricité utilisant du combustible nucléaire, celles-ci étant les seules à générer des déchets radioactifs provenant d’une telle utilisation.
… et est compatible avec le traité Euratom
La Cour considère, ensuite, que le traité Euratom, dont relève le combustible nucléaire, ne s’oppose pas non plus à la taxe en question. Celle-ci ne constitue pas une taxe d’effet équivalent à un droit de douane. En effet, elle est perçue non pas parce que le combustible nucléaire franchit une frontière, mais parce que celui-ci est utilisé aux fins de la production industrielle d’électricité, sans distinction de l’origine de ce combustible.
En outre, une procédure devant la Cour constitutionnelle allemande est pendante. Celle-ci se prononcera avant la fin de l’année sur la compétence réelle du gouvernement allemand à percevoir ce type de taxe.
Source
M.A./C.B. d’après un communiqué de presse de la CJUE du 4 juin 2015