Chute des prix et charge fiscale unilatérale pénalisent British Energy
Le gouvernement britannique a accordé à la compagnie électrique British Energy (BE) un prêt à court terme de 410 millions de livres, réagissant ainsi à la crainte d'une faillite imminente.
Ce prêt va permettre d'introduire également des restructurations à plus long terme. La compagnie BE, privatisée en 1996, produit plus d'un cinquième de l'électricité britannique; c'est aussi l'un des plus gros exploitants de centrales nucléaires du monde. BE possède en effet sept tranches jumelles du type AGR (réacteur avancé refroidi au gaz) et une tranche avec réacteur à eau sous pression. Aux Etats-Unis, BE détient des participations dans trois autres tranches nucléaires par l'intermédiaire de la joint venture AmerGen et au Canada, elle exploite par le biais de sa filiale Bruce Power la centrale nucléaire de Bruce dont quatre tranches sont actuellement en service, ceci dans le cadre d'un contrat de leasing. Le portefeuille de BE compte également depuis mars 2000 une grande centrale britannique au charbon.
Comment en est-on arrivé à ce qu'une compagnie d'électricité très performante à l'étranger, et distinguée à plusieurs reprises, soit obligée de demander l'aide de l'Etat? Selon un article de fond de l'Agence internationale d'informations nucléaires NucNet, la crise actuelle s'explique par la combinaison de trois éléments, à savoir la baisse des prix de l'électricité, une charge fiscale unilatérale et des contrats désavantageux pour la gestion des déchets.
Baisse des prix de l'électricité: au cours de ces deux dernières années, des surcapacités et l'introduction des "New Electricity Trading Arrangements" ont mis fortement sous pression les prix de gros de l'électricité, privant BE de plus de 200 millions de livres de recettes. Tous les producteurs souffrent de la chute des prix. Au moins un producteur d'électricité au charbon a dû fermer ses portes pour des raisons financières. Pour sa part, BE a dû procéder à des amortissements de 300 millions de livres sur la centrale à charbon d'Eggborough. Autre élément qui ne facilite pas les choses non plus pour BE: avec son parc de centrales électriques, elle peut réagir avec moins de flexibilité à la chute des prix de gros de l'électricité. L'entreprise manque par ailleurs d'un pilier solide dans le domaine du négoce et de la distribution: contrairement à ses principaux concurrents, elle ne peut pas compenser la perte de recettes de production par des marges plus élevées dans ses ventes d'électricité aux consommateurs finals.
Imposition fiscale: depuis l'année dernière - ce qui est tout fait paradoxal - une taxe climatique correspondant à environ 1 ct/kWh est perçue sur l'énergie nucléaire, qui n'émet pas de CO2, taxe supportée conjointement par le producteur et par le consommateur. BE demande que comme les énergies solaire et éolienne, l'énergie nucléaire soit exemptée de cet impôt. L'entreprise et les consommateurs seraient ainsi déchargés d'une imposition fiscale de 270 millions de livres par an; pour la seule BE, les économies devraient atteindre de 80 à 100 millions de livres. Les centrales nucléaires doivent par ailleurs payer des impôts fonciers supérieurs de 50% à ceux des centrales au charbon et au gaz. Par rapport aux centrales éoliennes, l'impôt est même trois fois plus élevé. Cette inégalité de traitement coûte 20 millions de livres à BE chaque année.
Gestion des déchets: le traitement du combustible usé relève de la compagnie nationale BNFL. BE réclame de nouveaux contrats reflétant la réalité du marché. Lors de la présentation de résultats intermédiaires en novembre dernier, le président de BE, M. Robin Jeffrey, a soulevé la question du retraitement à son avis trop cher, cherté dont profite finalement l'Etat, comme pour les impôts.
Toutes ces dépenses financières conjuguées à un marché de l'électricité britannique de toute façon difficile constituent pour l'exploitant de centrales nucléaires une charge considérable. Les problèmes techniques que connaît la centrale nucléaire écossaise de Torness n'ont certainement pas arrangé la situation pour BE: du fait des mois d'interruption de production, les prévisions relatives à la production d'électricité nucléaire nationale ont dû être révisées à la baisse et au lieu des 67,5 milliards de kWh escomptés, les centrales nucléaires de BE ne livreront probablement que 63 milliards de kWh cette année.
Source
M.S./C.P.
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