Pour une réautorisation de la construction de centrales nucléaires

La levée de l’interdiction de construire de nouvelles centrales nucléaires n’est rien d’autre que la condition sine qua non d’un réexamen non biaisé de notre politique énergétique.

8 janv. 2025
Peter Schilliger Vorstandsmitglied des Nuklearforums Schweiz
Source: Nuklearforum Schweiz

Si le tournant énergétique pouvait réussir sans nouvelles centrales nucléaires, je n’aurais rien contre. Voilà un point qu’il me semble important de souligner en préambule. Si ce projet (qui vise à passer à un approvisionnement en électricité basé sur des sources respectueuses du climat autres que l’atome) était sur la bonne voie, je n’insisterais pas pour que l’on se remette à construire des centrales nucléaires. Et je dirais même plus: si j’étais convaincu du succès de la Stratégie énergétique 2050, je ne m’exprimerais probablement pas dans ces colonnes et je ne siégerais pas au Comité du Forum nucléaire.

Comme l’a expliqué le conseiller fédéral Albert Rösti lors de la conférence de presse consacrée à l’initiative «Stop au blackout» et au contre-projet du Conseil fédéral, les conditions-cadres ont changé fondamentalement depuis l’adoption de la Stratégie énergétique. Le changement le plus significatif est à mon avis l’objectif de zéro émission nette adopté par le Conseil fédéral en 2019, et que les électeurs ont inscrit dans la législation en disant oui à la «loi sur le climat et l’innovation». De ce fait, même les centrales au gaz, qui sont pourtant les centrales fossiles les moins émettrices de CO2, cessent d’être une alternative viable au nucléaire, et entrent tout au plus en ligne de compte comme réserve de secours.

Les énergies fossiles et le zéro net s’excluent mutuellement

Pour atteindre l’objectif «zéro net», la Suisse doit couvrir la quasi-totalité de sa consommation énergétique de manière respectueuse du climat. Conjugué à la croissance de la population, cet impératif implique une montée en flèche des besoins en électricité. Au vu de la situation politique mondiale, il est à mon avis tout sauf garanti que nous puissions compter sur des partenaires étrangers pour couvrir ces besoins. De plus, l’électricité importée ne viendrait pas forcément de sources respectueuses du climat, ce qui mettrait en péril notre neutralité climatique. Tout cela m’amène à conclure que nous devons repenser la Stratégie énergétique.

Lorsqu’il devient évident qu’un projet est voué à l’échec, il faut réfléchir à des solutions de rechange. Et l’ouverture technologique est l’une des conditions fondamentales d’une recherche de solutions non biaisée. La levée de l’interdiction de construire des centrales nucléaires est le premier pas indispensable en ce sens, ni plus ni moins. Une telle levée ne signifie pas que nous allons bâtir une nouvelle centrale nucléaire le lundi suivant la votation, et elle ne signifie en aucun cas que nous allons cesser de développer les énergies renouvelables.

Plus d’analyse et moins d’idéologie

L’affirmation selon laquelle les énergies nucléaire et renouvelables s’excluent ou se bloquent mutuellement est propre au mouvement antinucléaire. Les mêmes milieux aiment à présenter l’interdiction de construire de nouvelles centrales nucléaires comme une décision irrévocable et sa levée comme une marque de «mépris de la volonté populaire» (citation tirée de la campagne des Verts). Je rappelle que depuis 1979, six initiatives populaires visant à abandonner l’atome ont été soumises aux urnes. Elles ont été rejetées l’une après l’autre – ce qui n’a pas empêché les opposants de déposer à chaque fois de nouvelles initiatives. Revenir sur une décision populaire lorsque les fondamentaux ont changé n’a rien d’antidémocratique. On prétend aussi qu’avec le contre-projet indirect, le conseiller fédéral Rösti veut faire passer l’abandon de la sortie du nucléaire en contournant la volonté du peuple. Mais ce contre-projet est sujet au référendum facultatif, comme n’importe quelle autre modification législative à l’échelon fédéral. Il suffit donc de 50 000 signatures pour que la levée de l’interdiction de construire de nouvelles installations nucléaires soit soumise au peuple. Et je suis curieux de connaître l’issue du scrutin. J’ose même prédire qu’il ne faudra pas six initiatives populaires pour que la sortie du nucléaire soit abandonnée.

Peter Schilliger est entrepreneur et conseiller national PLR. Depuis 2024, il siège au Comité du Forum nucléaire suisse. Il s’investit également au sein de la Chambre des métiers de l’Union suisse des arts et métiers, et du Comité de l’Union patronale suisse.

Auteur

Peter Schilliger, Vorstandsmitglied des Nuklearforums Schweiz

Articles sur le même thème

Restez informé-e!

Abonnez-vous à notre newsletter

Vers l’abonnement à la newsletter

Profitez de nombreux avantages

Devenez membre du plus grand réseau nucléaire de Suisse!

Les avantages en tant que membre